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PÉNALITÉS LAITIÈRES Le système français en sursis

© WATIER VISUEL

Les attaques contre la TFA (taxe fiscale affectée) vont peut-être aboutir. Bruxelles a demandé des explications à Paris.

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Les éleveurs français sont les seuls à être pénalisés en cas de dépassement de quotas alors que la référence nationale n'est pas atteinte. Ce prélèvement, dénommé TFA (taxe fiscale affectée), sert à financer les aides à la cessation laitière. Il figure souvent sous le terme « pénalités » sur les paies de lait. Sous l'angle de la réglementation européenne, il apparaît comme une subvention. Ce système a été dénoncé plusieurs fois à Bruxelles car la législation européenne n'exige des pénalités que lorsque la référence nationale est dépassée. Mais la France a réussi à maintenir son originalité en jouant sur la forme : les taxes relèvent de la politique fiscale qui est libre. Il existe un consensus entre la filière et l'État autour de la nécessité de brider les plus dynamiques pour faire de la restructuration. La TFA est fixée dans la loi de finances, et ses modalités sont discutées au sein de FranceAgriMer en présence de l'ensemble des syndicats. Il n'empêche que ce système est éloigné de l'esprit européen dans lequel se retrouve une minorité d'éleveurs. Certains d'entre eux ont adressé une lettre dénonçant la TFA aux directions de l'agriculture et de la concurrence à Bruxelles. Et ils semblent faire mouche. la Commission a demandé à l'État français de se justifier dans un délai de trente jours qui a expiré début janvier. La France joue la montre et a demandé plus de temps. Mais elle devra répondre. Dans un contexte de campagne électorale, difficile de trancher sur un sujet aussi sensible.

Une procédure qui risque de durer

La TFA est donc en sursis, mais il serait risqué de miser sur sa disparition dès cette année. La procédure pourra être longue. Il faut savoir que les commissaires européens auraient pu classer l'affaire. Les politiques français pouvaient faire pression en ce sens, et l'ont sans doute fait. Si Bruxelles a décidé de demander des explications, c'est sans doute parce que les arguments des éleveurs sont fondés. Les défenseurs du système relativisent. Car la fin des quotas est proche et la France pourrait produire sa référence cette campagne ; les enjeux sont minimes. Il n'empêche que l'État risque bel et bien d'être condamné à payer une amende pour non-respect de la réglementation européenne. Un chèque qui pourrait se monter à plusieurs centaines de millions d'euros. En outre, les éleveurs qui ont payé ces pénalités pourraient demander leur remboursement. On peut aussi imaginer une forme d'arrangement : la suppression de la TFA contre l'annulation de l'amende. Mais cette affaire pourrait en soulever une autre : celle des CVO prélevées par le Cniel, un système qui reste incompréhensible et suspect vu de Bruxelles. Et surtout, une telle victoire montrerait que la France ne peut plus aller à l'encontre des objectifs européens. Sa tradition de cogestion visant à faire de l'aménagement du territoire avec le lait, quitte à alourdir la barque des plus dynamiques, n'en sortirait pas indemne. C'est sans doute là le but visé par les rédacteurs de la lettre qui ne demandent qu'une chose : jouer dans la même cour, et donc avec les mêmes règles, que leurs concurrents européens.

PASCALE LE CANN

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